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Successions très convoitées…

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Posté le 07/10/2013
Articles de fond

Parmi les conditions cadre essentielles pour l’attractivité de Genève sur lesquelles la CCIG travaille, la fiscalité requiert une attention toute particulière. Celle-ci est en effet en passe de devenir un instrument politique, tantôt incitatif, tantôt coercitif, visant à influencer le comportement des administrés.

Cette évolution met une pression importante sur l’édifice fiscal tant national que genevois au travers de nombreux projets et initiatives. La CCIG a d’ailleurs récemment publié une étude téléchargeable à l’adresse www.ccig.ch/brochurefiscale

Il ne sera pas possible de s’affranchir de certaines réformes. Tel est le cas de l’inéluctable métamorphose de la fiscalité des entreprises et de la fixation d’un taux unique d’imposition du bénéfice à 13%. La préservation de dizaine de milliers d’emplois sur le canton en dépend.

D’autres projets, issus d’initiatives fédérales et cantonales, sont en revanche autant de menaces sur la stabilité et la qualité de l’environnement législatif et fiscal. Les initiatives visant à abolir le système de l’imposition d’après la dépense ou le bouclier fiscal introduit à Genève sont les meilleurs moyens de vider les caisses des collectivités publiques en repoussant des contribuables très importants au-delà des frontières cantonales.

L’actualité de l’été a vu la question de la fiscalité successorale venir sur le devant de la scène avec la signature d’une convention léonine de double imposition avec la France et le rejet par le Conseil fédéral de l’initiative fédérale visant à taxer à un taux de 20% les successions et donations. Un point de situation sur ces deux sujets s’impose.


Convention de double imposition franco-suisse sur les successions

Le 11 juillet 2013, la Suisse et la France ont signé – mais non ratifié – une nouvelle Convention de double imposition en matière de succession (ci-après « la CDI » ou « la Convention »), en remplacement de celle de 1953, modifiée en 1997. Cette renégociation était le fruit de la volonté de la France de dénoncer le texte en vigueur.

La convention encore actuellement en vigueur repose sur le principe selon lequel les impôts successoraux sont prélevés par l’Etat de domicile du défunt. Le domicile de l’héritier n’entraîne pas d’assujettissement. A l’exception des sociétés civiles immobilières (SCI), les biens immobiliers sont pour leur part assujettis au lieu de situation de l‘immeuble. L’actuelle CDI est conforme aux standards de l’OCDE.

La nouvelle convention, pour sa part, consacre le principe de l’assujettissement illimité par le pays de domicile de l’héritier. Elle permet donc un double assujettissement, tant par le pays de domicile du défunt que par celui de l’héritier, la double imposition étant évitée par le système du crédit d’impôt. Ce double assujettissement s’applique également aux biens immobiliers.

La Convention signée présente un déséquilibre total en défaveur de la Suisse au point qu’une situation de vide conventionnel se révélerait préférable à la ratification de ce texte qui figerait la situation pour des décennies. De manière directe ou indirecte, la nouvelle CDI cumule les désavantages pour la Suisse et péjore la situation des ressortissants helvétiques  résidant en France (plus de 183'000 en 2011 selon l’OFS), lesquels se verraient imposer des droits de succession à des taux parfois très élevé (taux marginal de 45%).

Pour les biens immobiliers – même sis en Suisse – et  pour les entreprises familiales, le risque de devoir se séparer du patrimoine hérité pour payer les droits de succession est important.

La CCIG a préparé un dossier à ce sujet, disponible en français et en allemand, téléchargeable depuis notre site web, au chapitre public.


((Encadré 1))

Le point de vue de Stéphane Tanner et André Tinguely, membres de la commission fiscale de la CCIG

« L’imposition en raison du domicile des héritiers est contraire à la règle principale fixée par la convention modèle OCDE, laquelle prévoit qu’une succession n’est soumise qu’à la souveraineté fiscale du pays dans lequel était domicilié le défunt.

Le texte qui nous est proposé n’a pour seul effet véritable que de reconnaître l’application du droit fiscal français, sans égard aux règles précitées ni aux intérêts de la Suisse.

C’est ainsi qu’il serait admis que la France puisse imposer les successions qui sont liées à un défunt domicilié en France ou un immeuble sis en France, mais également celles qui échoient à un résident de France, même lorsque ces successions impliquent des immeubles sis en Suisse.

Le projet de convention ne présente de fait qu’une seule vertu, celle prévoyant que l’impôt français sur les successions soit réduit de celui qui aurait déjà été payé en Suisse.

Or il ne s’agit ici pas d’une concession faite par la France, dont le droit fiscal prévoit cette «imputation», mais d’un mauvais argument destiné à cacher l’abandon de souveraineté que consentirait la Suisse. »

 


Initiative fédérale pour imposer les successions et donations

L’initiative fédérale pour réformer la fiscalité successorale a été déposée, munie du nombre de signatures requises, le 15 février 2013. Elle vise à imposer à hauteur de 20% les successions et donations, sous déduction d’une « franchise » de 2 millions sur la masse successorale, et de distribuer cette manne fiscale pour deux tiers au Fonds de compensation de l’AVS et un tiers aux cantons qui n’auraient plus de compétence en la matière.

Après la conférence des directeurs cantonaux des finances ce printemps, c’est le Conseil fédéral qui a récemment refusé ce texte et décidé de ne pas lui opposer de contre-projet.

Actuellement, la possibilité de prélever un impôt sur les successions et les donations est du ressort exclusif des cantons. La plupart ont décidé d’exonérer les descendants directs et le conjoint survivant de tout impôt, comme c’est le cas à Genève.

Outre son effet rétroactif fortement contesté – les transactions effectuées dès le 1er janvier 2012 seraient concernées –, l’objectif de cette initiative est de taxer une nouvelle fois un même patrimoine, lequel s’est déjà vu imposer annuellement sur la fortune, au plan cantonal. Elle met également en danger les transmissions de patrimoines immobiliers et, malgré des allégements indéfinis conditionnés à une exploitation de dix ans, la poursuite de l’activité des entreprises familiales.

La CCIG s’opposera fermement à cette nouvelle ponction fiscale et à cette attaque frontale contre la souveraineté cantonale.


((Encadré 2))

Le point de vue de Stéphane Tanner et André Tinguely, membres de la commission fiscale de la CCIG

« La compétence de prélever l’impôt est répartie entre la Confédération et les cantons (communes) d’une manière équilibrée et garante de notre fédéralisme.

C’est ainsi que si les impôts sur le revenu sont prélevés par la Confédération et les cantons, certains impôts sont de compétence exclusivement nationale (impôt anticipé, TVA…) et d’autres de compétence purement cantonale (impôt sur la fortune, impôt de succession…).

Cette répartition de compétence, qui permet aux cantons de s’adapter rapidement à l’évolution de la société, est garante de leur souveraineté.

Or, si cette souveraineté est importante au plan national (cf CDI en matière de succession) elle ne l’est pas moins au plan des cantons et doit donc être absolument défendue.

Il ne serait par ailleurs pas justifiable que l’amélioration du financement de l’AVS engendre une densification des taxes fédérale et une complexité accrue du système. »

 

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