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Partenariat public-privé : Une solution d'avenir pour les infrastructures

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Posté le 22/12/2014
Articles de fond

Depuis longtemps, la CCIG s’engage en faveur du bouclement autoroutier du canton. Elle opère un lobbying actif tant auprès des acteurs genevois que des autres acteurs suisses. Car, si l’infrastructure se situe dans notre canton, son financement se décidera à Berne, et Genève a besoin de soutien confédéral. Nombreux sont les projets d’infrastructure routière qui attendent un financement fédéral et les moyens de la Confédération ne permettront pas de les financer tous dans des délais convenables. Un appui populaire au projet genevois est dès lors indispensable, c’est pourquoi la CCIG a rejoint les partisans de l’initiative populaire cantonale « OUI à la grande Traversée du Lac ! », dont la récolte de signatures battra son plein jusque début janvier 2015. Le texte de l’initiative indique qu’afin d’accélérer la réalisation de l’ouvrage, un partenariat avec le secteur privé est envisagé parallèlement au mode de financement prévu par la Confédération.

 

Qu'est-ce que le partenariat public-privé ?
Le partenariat public-privé (PPP) permet à une collectivité publique de confier à une entreprise privée un projet global. L’entreprise a pour mission de concevoir, financer et réaliser une prestation ou un ouvrage de service public et d’en assurer ensuite la maintenance et la gestion. Le cadre temporel est défini et un paiement, échelonné dans le temps, est effectué par l’entité publique.

 

Le PPP offre une approche différente pour financer et gérer des projets d’utilité publique. Le secteur public n’achète plus un bien, mais un service. Celui-ci va de la conception à la maintenance, en passant par le financement, la construction et l’exploitation. En échange, le secteur public paie des annuités financières (loyer, subvention, recettes versées par les utilisateurs, etc.) dès la fin de la construction, lorsque les ouvrages sont totalement réceptionnés.

 

Autre principe : la durée. Un PPP s’inscrit dans le long terme, au moins 25 ans. Les risques inhérents au projet sont portés par l’entité la plus à même de les contrôler et de les mesurer. Une bonne répartition est donc la clé d’un PPP réussi. Les pouvoirs publics ne renoncent pas à une tâche ou à la fourniture de prestations pour la transférer au privé. Un PPP permet à ces deux secteurs de réaliser ensemble un projet, chacun mettant en jeu ses meilleurs atouts.

 

Une formule appelée à se développer en Suisse
Le concept de PPP n’est pas encore très répandu en Suisse pour financer des infrastructures. La première explication à cet état de fait réside vraisemblablement dans la bonne santé financière de la Confédération. Tant que cette dernière trouve des conditions financières avantageuses sur le marché des capitaux, le recours à des investisseurs privés ne s’avère pas très intéressant. La législation restrictive envers les caisses de pension est aussi un facteur d’explication, puisque la loi inclut les infrastructures dans la catégorie des placements alternatifs, autorisés à hauteur de 15% au maximum du portefeuille d’investissement des caisses.

 

La Confédération encourage cependant les projets PPP depuis la mise en œuvre de la directive, émise par le Département fédéral des finances en février 2009, relative à des projets de PPP dans l’administration fédérale. Cette directive est une application de l’ordonnance du 5 avril 2006 sur les finances de la Confédération, qui prévoit ce qui suit :

Art. 52a Collaboration avec des partenaires privés ("Public Private Partnership") (art. 39 et 57 LFC)
1 Dans l’accomplissement des tâches, les unités administratives examinent, s’il y a lieu, la possibilité de collaborer à plus long terme, sur des bases contractuelles, avec des partenaires privés.
2 L’Administration des finances règle les détails dans des directives.

 

Cependant, comme l’a écrit le Conseil fédéral le 5 novembre dernier en réponse à une interpellation (14.3925) déposée par le Conseiller aux Etats Fabio Abate : « La promotion des PPP n'est pas un objectif essentiel du Conseil fédéral. Le PPP est une possibilité parmi d'autres de réaliser et de financer un projet. Il ne doit certes pas être discriminé, mais doit être examiné aussi rigoureusement que les autres modèles. De l'avis du Conseil fédéral, il faut mettre l'accent sur l'efficience des solutions destinées à permettre l'accomplissement des tâches. »

 

Si les faibles coûts de financement actuels de la Confédération ne favorisent pas encore le recours à la formule du PPP, il en va différemment dans les cantons où plusieurs projets de PPP ont vu le jour.

 

Une solution pour financer la Traversée du Lac
En 2013, economiesuisse a, sur mandat de la Fédération des Entreprises Romandes Genève, de la CCIG et de la Fédération genevoise des Métiers du Bâtiment, conduit une étude pour explorer une solution de PPP pour la Traversée du Lac. D’autres partenaires ont permis de concrétiser le projet et apporté leur expertise : la Fondation Genève Place Financière, Retraites Populaires, Losinger Marazzi et UBS. L’objectif de l’étude était d’évaluer la faisabilité d’une réalisation du projet par une approche PPP et donc de disposer d’une solution alternative notamment afin d’accélérer sa réalisation.

 

L’étude de pré-faisabilité est arrivée à la conclusion que la Traversée du Lac remplit les conditions d’une réalisation par PPP selon les standards internationaux et les critères d’aptitude reconnus par l’administration fédérale. Celle-ci aurait d’importants avantages pour l’Etat : motivation du partenaire privé à fournir l’infrastructure dans un délai et un budget donnés, répartition équilibrée des risques entre partenaires, optimisation des coûts, effets positifs sur les liquidités du partenaire public. Si la législation suisse est compatible avec un PPP, la mise en place d’un péage, envisagée, nécessiterait d’obtenir une autorisation exceptionnelle de la part du Parlement.

 

Le Conseil d’Etat vise 2030
En octobre 2014, le Conseil d'Etat a approuvé le rapport « Traversée du Lac – Pour le bouclement autoroutier de Genève » et validé un plan d'actions visant à accompagner le potentiel de développement de la rive gauche en la connectant d'ici 2030 au réseau autoroutier. Ce rapport et son plan d'actions seront transmis à la Confédération.

 

La Traversée du Lac et le contournement constituent des infrastructures d’envergure nationale. C’est pourquoi le Gouvernement genevois a demandé à la Confédération de les inscrire dans le réseau des routes nationales, en vue de leur construction à l’horizon 2030. Néanmoins, pour en accélérer la réalisation, tout en limitant l’effort d’investissement de la collectivité au cours des prochaines années, l’Etat pourrait préfinancer l’ouvrage en ayant recours à un PPP et à la mise en place d’un péage.

 

Le coût des ouvrages est estimé entre 2,8 et 3,3 milliards de francs pour la réalisation du bouclement complet. L’option constructive pour la Traversée du Lac (pont ou tunnel) n’est pas arrêtée. Les scénarios sont évalués pour la durée du contrat de partenariat, soit, ici, 50 ans. Cette durée comporte deux phases principales :
- Une phase de conception et de réalisation des ouvrages, estimée à 10 ans, durant laquelle le partenaire privé et, cas échéant, l’Etat investissent pour réaliser le projet ;
- Une phase d’exploitation, estimée à 40 ans, durant laquelle le partenaire privé exploite et entretient les ouvrages, l’Etat lui versant alors l’équivalent d’un «loyer». C’est également durant cette phase qu’un éventuel péage peut être perçu. A la fin du contrat, les ouvrages reviennent à l’Etat.

 

Pour compléter ces scénarios de PPP (dans lesquels l’Etat investit entre 0 et 50%), la variante où l’Etat investit seul (100%) est également mentionnée pour comparer les impacts financiers de ces scénarios.

 

Les réflexions confirment la faisabilité d’un financement du bouclement autoroutier pour 2030. Elles privilégient la mise en place d’un péage sur la Traversée du Lac, à acquitter par chaque usager, et la participation de l’Etat au financement initial de l’infrastructure de manière significative, voire totale.

 

Les réflexions ultérieures permettront de préciser la solution à préconiser. Ainsi, il subsiste plusieurs sujets qui devront être traités dans les prochaines années pour la rendre possible, ces derniers dépendant de la Confédération (par exemple, possibilité de mettre en place un péage, propriété de l’ouvrage), mais également directement du Canton (le mécanisme de frein à l’endettement sera déterminant pour évaluer la part de l’Etat dans le financement). Il faudra aussi obtenir l’accord de l’assemblée fédérale pour instaurer un péage sur la Traversée du Lac, selon les dispositions de la Constitution fédérale.

 

Conclusion
Dans quinze ans, le canton devrait compter 100 000 habitants et 70 000 emplois de plus qu’aujourd’hui. La demande de mobilité continuera à progresser et ne pourra pas être absorbée intégralement par les transports publics. La Traversée du Lac permettra de canaliser la circulation. Un soutien populaire à l’initiative en faveur de la grande traversée montrera aux autorités fédérales que les Genevois entendent assumer et maîtriser le développement de leur canton. La CCIG encourage ses membres à signer cette initiative cantonale.

 


Le PPP à travers quelques exemples 

 

A la tête du Département municipal de Genève de la culture et des sports, le conseiller administratif Sami Kanaan déclarait en avril 2014 au journal Le Courrier que « l'avenir passera [...] par l'implication du canton dans les grandes infrastructures sportives et culturelle set le développement des partenariats public-privé ». La patinoire du Trèfle-blanc en est un bon exemple.

 

Le Genève-Servette Hockey Club (GSHC) réunit 7000 spectateurs plus de 30 fois par année à la patinoire des Vernets. Or, cette infrastructure vieillissante ne répondra plus aux nouvelles normes de la Ligue nationale dès la saison 2018-2019. Il s’agit donc de construire une nouvelle patinoire ailleurs : le site du Trèfle-Blanc (commune de Lancy) a été retenu. Mais cela ne permet pas encore de donner le premier coup de pioche. « Les collectivités publiques – cantons et communes (ville de Genève et Lancy) – n’ont ni la volonté ni la capacité d’être les promoteurs d’un tel projet, explique François Dieu, administrateur de Créateurs Immobiliers SA et mandaté par GSHC pour piloter le développement du projet de nouvelle patinoire. Celles-ci envisagent donc de recourir au PPP, charge au GSHC de trouver les investisseurs.

 

Un groupe d’investisseurs est actuellement pressenti. Outre la construction de la patinoire et des infrastructures qui lui sont liées, l’investisseur aura également la responsabilité de l’exploitation du complexe immobilier dont la patinoire est un élément. « En fait, ce qui rend un tel programme attractif pour l’investisseur, poursuit François Dieu, ce n’est pas la patinoire elle-même – qui peut difficilement être rentable – mais le programme immobilier annexe, qui comprendra hôtel, bureaux, centres médicaux et commerces de proximité.

 

Deux points – et non des moindres – sont encore en discussion. Il s’agit tout d’abord de la maîtrise foncière : l’Etat, propriétaire majoritaire, doit encore acquérir quelques parcelles  du périmètre, en mains privées. Quand ? Une question déterminante pour boucler un planning. De même, la contribution des autorités publiques doit être discutée : en effet, le GSHC ne sera pas le seul utilisateur de la glace, les collectivités l’utiliseront aussi pour des activités avec les enfants et les jeunes.

 

L’Association PPP Suisse a été fondée le 19 mai 2006 par des représentants de la Confédération helvétique, de différents cantons et villes ainsi que des milieux économique et scientifique. Sur son site (www.ppp-suisse.ch) figurent quelques exemples récents de PPP :

 

Auberge de jeunesse de Saas-Fee
Le « wellnesshostel4000 » de Saas-Fee, première auberge de jeunesse wellness au monde, a reçu le Prix suisse du tourisme « Milestone 2014 », qui prime l'innovation dans le tourisme. Le PPP a permis à la commune de rénover le centre de loisirs de la station pour en faire le spa de l'établissement. Cette nouveauté mondiale a pu voir le jour dans le village du Haut-Valais grâce à la collaboration étroite des Auberges de Jeunesse Suisses et de la commune bourgeoise de Saas-Fee, qui ont planifié et réalisé conjointement cette construction. La maîtrise de l’ouvrage de la partie destinée à l’hébergement était entre les mains de la Fondation Suisse pour le Tourisme Social, responsable de la construction et de l’entretien des auberges de jeunesse en Suisse ; l’ouvrage de l’espace de wellness et de fitness incombait à la commune bourgeoise de Saas-Fee. Les deux unités sont gérées par les Auberges de Jeunesse Suisses.

 

Un centre de chirurgie ambulatoire à Lausanne
Doté de sept salles d'opération, le bâtiment est le fruit d'un PPP. Le Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV), MV Santé, un groupe privé spécialisé dans la chirurgie ambulatoire, et la Fondation de l'hôpital orthopédique ont en effet uni leurs forces pour permettre la réalisation de ce bâtiment, qui se tient non loin du CHUV. Le site, qui a coûté 16 millions de francs, dispose de six salles d'opération et d'un bloc pour les interventions dentaires.

 

Les travaux de construction du centre ont été financés par la Fondation de l'hôpital orthopédique. Présent pour l'inauguration, le conseiller d'Etat en charge de la santé, Pierre-Yves Maillard, a souligné le pragmatisme de ce projet et son aspect équitable. « Dans un contexte où de nombreux crédits d'investissements sont demandés pour le CHUV, si on peut une fois bénéficier d'autres investissements, c'est une belle opportunité. » (source : 24 heures online du 3 avril 2014).

 

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